Nutrition animale L'atout protéines
Enjeu stratégique mis en évidence dès l'embargo américain sur le soja de 1973, la protéine est aussi l'objet d'interrogations sociétales. La nutrition animale française propose des solutions pour en consommer moins et en valoriser une grande diversité. Pour, au final, répondre aux différents segments de marchés.
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Les matières riches en protéines comme les tourteaux de soja, de colza et de tournesol, représentent près d'un tiers des volumes de matières premières mises en oeuvre par les usines d'aliments pour animaux françaises. Mais, ces dernières savent aussi valoriser les protéines présentes dans leurs autres matières premières, comme les 18 % de la luzerne déshydratée et les 11 % du blé. Au total, incorporées dans les aliments ou apportées à la ferme, les céréales, blé, orge, maïs et coproduits confondus, couvrent 35 % des besoins protéiques des élevages contre 29 % pour le tourteau de soja. La France se distingue d'ailleurs de ses voisins européens par sa plus grande autonomie protéique, à 38 %, selon Christian Huyghe, directeur scientifique adjoint Agriculture à l'Inra, qui consacre un vaste chapitre aux protéines dans le Demeter 2017. L'Union européenne est, elle, dépendante à 68 % !
Le développement des drèches et des tourteaux de colza, grâce à la montée des biocarburants, a permis de réduire la part des tourteaux de soja importés en France. Ils ne représentent plus que 12 % des volumes de matières premières, principalement en provenance du Brésil, un peu également de l'Inde sur le créneau non OGM. Le tourteau de soja qui auparavant trônait en tête, ne pèse donc plus que 45 % de l'ensemble des tourteaux même si sa concentration et le profil de ses protéines lui conservent une place de choix dans les formules les plus concentrées pour les volailles, et les bovins.
La fraction la plus coûteuse
Les matières premières, dont la fraction protéique est la plus coûteuse, représentent un poids massif dans la production animale. Cela incite les fabricants d'aliments à valoriser au mieux toutes les ressources, en ayant recours aux additifs, aux enzymes pour améliorer la digestibilité et aux acides aminés pour assurer des apports précis et réduire le gaspillage. Leurs fournisseurs industriels poursuivent leurs investissements pour accroître leur capacité de production. Adisseo vient ainsi de confirmer que son projet Polar, lancé début 2017, viendra ajouter une capacité de 50 000 t à ses capacités européennes en méthionine, d'ici à fin 2018. La firme lancera également une nouvelle forme de méthionine en poudre début 2018. La question est en effet de fournir les industriels non seulement en Europe de l'Ouest, mais bien dans le monde entier, avide dans son ensemble de protéines animales.
Autonomie relative de la France
Toutes ces données pointent l'impact de la fraction protéique en nutrition animale. En plus du facteur nutritionnel pour l'équilibre alimentaire des rations, s'y mêlent les questions stratégiques d'autonomie nationale, et d'environnement : transports, déforestation des forêts équatoriales et tropicales, gestion des rejets animaux. Sans compter les questions sociétales, OGM ou non OGM, disponibilités des ressources pour l'alimentation humaine, et bien évidemment les aspects économiques, volatilité, disponibilité, poids du géant chinois. La France, pourtant privilégiée par sa situation pédoclimatique et son historique en matière de productions animales diversifiées, perd pied sur la scène internationale comme le pointaient les orateurs de la journée, « La protéine dans tous ses états », organisée par le Céréopa en mai dernier. La France est ainsi, contrairement à une idée très répandue, exportatrice nette de 2 Mt de protéines végétales, car les ventes de céréales font plus que compenser les achats de tourteaux riches en protéines. Garde-t-elle assez de valeur ajoutée ? Le déficit en produits animaux, de première comme de seconde transformation, annule presque l'excédent en céréales. Les importations de volailles creusent ainsi notre déficit.
Autre idée reçue à évacuer selon le Céréopa, si la baisse des importations de soja est réelle (1,2 Mt de moins entre 2005 et 2016), une bonne part en a été compensée par l'augmentation des importations de tournesolHiPro de la mer Noire. L'autonomie n'a donc progressé que marginalement. Et le plan « soja français » a encore beaucoup de chemin à faire pour couvrir réellement les besoins nationaux. C'est encore plus vrai, d'ailleurs, en agriculture bio.
DOSSIER RÉALISÉ PAR YANNE BOLOH
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